Au bout du chenal des Sables-d’Olonne (Vendée) aux quais noirs de monde, au matin du dimanche 10 novembre, l’émotion a fini par submerger Violette Dorange. Trois cent cinquante mille fans brandissant banderoles et drapeaux qui scandent votre nom, ça remue. Surtout quand, à 23 ans, on embarque pour sa première course autour du monde en solitaire, sans escale et sans assistance à la barre d’un monocoque de 18 mètres (Imoca).
Le tirage au sort qui l’avait désignée dernière des 40 engagés – dont six femmes – de la 10e édition du Vendée Globe à quitter le ponton, a permis à la benjamine de l’épreuve de partir vérifier que la terre est ronde, emplie d’une énergie décuplée.
A l’heure des regards embués et des silences éloquents sous un ciel gris et brumeux, Violette, en bottes et salopette de quart rouge, sa longue queue-de-cheval au vent, a savouré la déambulation protocolaire telle une astronaute prête à embarquer dans sa capsule. Non sans jeter une œillade au trophée de la course qu’elle rêve de gagner un jour.
« Joyeux Noël et bonne année », a-t-elle lancé, mutine, à ses proches et supporteurs qu’elle compte bien ne pas revoir avant d’avoir bouclé sa course d’ici trois mois voire un peu moins. « J’peux pas parler », s’étranglait Carole, sa maman qui jure pourtant s’être « habituée au fil des années », tout en étreignant Rose et Charles, ses deux aînés.
« On n’a pas d’autre choix que de la suivre »
« C’est complètement dingue d’être ici », rayonnait Violette, la veille, mains sur les hanches, comme on mesure le chemin parcouru sans être dupe de ce que réservent 45 000 km d’océans à venir. Si le Vendée Globe était un conte de fées, la navigatrice au format de poche (1,60 m) y tiendrait à coup sûr le rôle de la « Petite Poucette ». Pas un sou mais jamais à court de projets ni d’idées ingénieuses pour décrocher les moyens de les réaliser.
Depuis ses débuts en voile légère de compétition à La Rochelle (Charente-Maritime), à l’âge de 7 ans, elle a semé un à un les petits cailloux qui l’ont mené jusque-là. Etre la plus jeune concurrente des 35 ans d’histoire du Vendée Globe ? Même pas peur. Elle avait 15 ans, en mai 2016, lorsqu’elle a traversé la Manche de l’île de Wight (Royaume-Uni) à Cherbourg (Manche), en Optimist, une « caisse à a savon » de 2,33 m. Elle a aussi décroché trois podiums aux championnats du monde jeunes sur 420. Avant d’enchaîner, à partir de l’âge de 18 ans, une mini-transat (course en solitaire sur un monocoque de 6,60 m) et trois saisons sur Figaro (monocoque monotype de 10 m).
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