Il y a des curriculum vitae qui imposent d’emblée le respect. Celui du chef opérateur Pierre-William Glenn, grand nom de la photographie de cinéma française, en fait partie. Mort mardi 24 septembre, à l’âge de 80 ans (il était né le 31 octobre 1943 dans le Paris occupé), il avait accompagné François Truffaut, Jacques Rivette, André Téchiné, Jacques Doillon, Maurice Pialat, Bertrand Tavernier ou Claude Lelouch.
Le goût du cinéma lui vient précocement, dès le lendemain de la seconde guerre mondiale, il est sur le front des salles obscures, prenant si bien goût au cinéma que le jeune homme qu’il devient tient un inventaire des films qu’il y découvre.
Si sa vocation déçue de chirurgien et les études mathématiques qui s’ensuivent l’éloignent un moment de sa passion du cinéma, il y revient rapidement, à l’instigation de son ami Claude Miller (1942-2012), qui l’invite sur un tournage. Inscription à 21 ans à l’Institut des hautes études cinématographiques (aujourd’hui la Fémis), la fameuse école de cinéma, puis formation professionnelle auprès de l’immense William Lubtchansky (1937-2010), dont il devient l’assistant.
Eclectisme des choix
Il prend son autonomie à la fin des années 1960, se fait remarquer en réalisant l’image charbonneuse et mélancolique de Roue de cendres (Wheel of Ashes, 1968), joyau underground, tourné à Paris, du cinéaste américain Peter Emanuel Goldman, puis s’approprie les années 1970 comme son âge d’or, du point de vue à la fois de l’intensité de son travail (plus d’une trentaine de films à son actif), de l’accomplissement artistique et de l’éclectisme de ses choix.
On le trouve notamment à l’image de Camarades (1970), de Marin Karmitz ; Out 1 (1970), de Jacques Rivette ; Un aller simple (1971), de José Giovanni ; Etat de siège (1972), de Costa-Gavras ; La Nuit américaine (1973), de François Truffaut ; L’Horloger de Saint-Paul (1974) et Le Juge et l’Assassin (1976), de Bertrand Tavernier ; L’Amour violé (1978), de Yannick Bellon ; Passe ton bac d’abord (1978) et Loulou (1980), de Maurice Pialat ; Série noire (1979), d’Alain Corneau.
Large gamme, qui conjoint le film militant au polar, l’ovni expérimental au film politique, en passant par le film féministe. Il opérera ensuite aux côtés d’Yves Boisset (Le Prix du danger, 1983), Samuel Fuller (Sans espoir de retour, 1989), Euzhan Palcy (Une saison blanche et sèche, 1989). Non sans avoir importé des Etats-Unis le Steadicam, un appareil inventé, en 1978, par Garrett Brown, qui permet à l’opérateur de filmer en mouvement de manière parfaitement fluide. Il sera aussi cadreur sur Monsieur Klein (1976), le chef-d’œuvre de Joseph Losey, cinéaste qui l’aura, plus que tout autre, impressionné par sa science du regard.
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